I. Principes du PCA

La mise en place d’un plan de continuité d’activité n’est pas une obligation légale. Une circulaire DGT 2009/16 du 3 juillet 2009 relative à la pandémie grippale et complétant la circulaire DGT n° 2007/18 du 18 décembre 2007 recommandait sa mise en place pour les entreprises.

Cette circulaire réagissait à l’épidémie de SRAS (Syndrome respiratoire aigu sévère) de 2003 ainsi qu’à l’épidémie de grippe A / H1N1 survenue en 2009.

Le PCA permet d’organiser les actions à mener dans un cadre procédural permanent et adapté à la réalité de l’entreprise pour faire face à des situations inédites (pandémie, grève, terrorisme, tremblement de terre, tsunami, guerre, ou autres facteurs externes).

Le principe même d’un PCA est très utile pour la pérennité économique d’une entreprise et peut rassurer les clients, les banquiers, les assureurs.

Il doit permettre :

  • de maintenir l’activité essentielle ou la mise en sécurité de l’entreprise, y compris dans le cadre d’une activité minimale (mode "dégradé") ou d’une « mise en repli » (arrêt de l’activité);

  • de protéger les salariés.

II. Importance d’un PCA en cas de crise sanitaire

Au regard de l’urgence actuelle liée au coronavirus, voici les points, sans prétendre à leur exhaustivité, à retenir pour élaborer une première procédure de continuité d’activité. Nous en traçons les grandes lignes et renvoyons aux normes et guides pour le détail.

1. Désigner un responsable pour préparer et mettre en œuvre le PCA

Désignation par la direction générale d’une personne ayant les compétences et les pouvoirs ainsi que d’un suppléant.

2. Mettre en place une cellule de crise

Identifier :

  • les titulaires et les suppléants ;

  • les modalités de réunions et de communication ;

  • les objectifs et les modes de fonctionnement ;

  • en cas d’appartenance à un groupe, la politique de celui-ci ;

  • les établissements et agences en France et à l’étranger …

Se tenir informés des mesures prises par les pouvoirs publics au jour le jour, notamment les mesures en matière de consignes sanitaires, confinement, déplacements, zones touchées, fermetures des frontières, transi douaniers, transports, voyages, fermetures des établissements publics (crèche, écoles …), de confinement, décision préfectorale…

Communiquer régulièrement avec les salariés et leur institutions représentatives du personnel sur :

  • les mesures gouvernementales et préfectorales ;

  • les mesures prises par l’entreprise dans le cadre du plan de continuité ;

  • les règles sanitaires imposées par le gouvernement et les règles de sécurité spécifiques à l’entreprise.

Définition des moyens d’informer : par exemple, mise en place d’une plateforme téléphonique de crise, avec numéro de téléphone dédié, e-espace internet/ intranet dédié aux questions, communiqués internes, messages de la direction, affiches, mails, information sur les sites web utiles.

Maintenir la communication entre les salariés et les correspondants habituels prioritaires.

Définir les moyens de liaison entreprise/salariés et salariés/salariés :
Par exemple, création d’un annuaire des tél. professionnels, réflexions sur la possibilité de créer, sur volontariat, un annuaire des numéros de téléphone personnels et des adresses personnelles mail, ou de créer des adresses mail spécifiques par un fournisseur d’accès.

Définir la liste des correspondants habituels prioritaires et les moyens de liaison :
Par exemple, maison mère, filiale, agences, fournisseurs stratégiques, grand compte, organisation professionnelle, financiers …

Définition des moyens de liaison : par exemple, mise en place d’une plateforme téléphonique de crise, avec numéro de téléphone dédié, e-espace internet/ intranet dédié aux questions.

Identifier les structures externes officielles impliquées dans la gestion de la pandémie

Prévoir les liens à établir avec les organisations « ressources » :

  • votre organisation professionnelle en territoire et au national ;

  • le service interentreprises de santé au travail ;

  • les administrations, cellules de crise "pandémie" des préfectures de département et/ou des Agences régionales de santé ;

  • mairie, poste ;

  • commissariat, gendarmerie, armée ;

  • pompiers, Samu ;

  • médecins traitants à proximité, etc.

Etablir une procédure d’intervention en cas de suspicion d’infection d’une personne sur le lieu de travail (procédure simple avec si possible le médecin du travail).

Suivre strictement les consignes sanitaires diffusées par Santé Publique France.

Désigner la ou les personnes (volontaires) chargées de la prise en charge d’éventuels malades et d’un local dédié à recevoir les malades.

Définir le type de « formation courte » à lui donner et le formateur (si possible le médecin du travail).

Définir le matériel nécessaire (masques, gants, solution hydroalcoolique…)…

3. Identifier les activités essentielles à maintenir (à déterminer en fonction de l’évolution de la crise)

Recenser les activités précises dont le maintien semble indispensable.

Définir un ou plusieurs scénarii généraux de continuité ou de fermeture selon la gravité du pic de pandémie. (seuils de présents : par exemple 80%, 70%, 50%, 30% de salariés présents).

Recenser les fournisseurs et prestataires stratégiques :

  • Communiquer pour échanger des informations et se coordonner ;

  • S’assurer que les prestataires informatiques sont en capacité d’assurer la continuité de leur activité ;

  • Quels aménagements contractuels a-t-on prévus au cas où la réception des produits serait impossible?

  • Qu’ont prévu les fournisseurs, les prestataires extérieurs intervenant sur le site?

  • Quelles solutions alternatives ? ...

Relations avec les clients : Communiquer, se coordonner et rassurer ses clients.

Recenser les activités maintenues ou pas des clients
Exemples :

  • Les clients relevant des secteurs d’importance vitale ( secteur du soin, agroalimentaire, pharmaceutique …) : Cf plaquette du SGDSN, "La sécurité des activités d’importance vitale"

  • Les activités de maintenance (ex : hôpital, transport, filière agroalimentaire, sites SEVESO, nucléaire …), notamment pour des raisons de sécurité

  • Les activités de SAV …

Répondre à des sollicitations d’entreprises pour répondre à la défaillance d’un autre fournisseur.

Connaître les mesures prises par les donneurs d’ordre (plan de prévention).

S’assurer de la délivrance de la marchandise (transport).

Comment prévoir l’incapacité à honorer un contrat (engagement juridique lié au contrat) : Existence dans le contrat ou aménagement du contrat. Par exemple, clause d’imprévision conduisant à la renégociation du contrat, clause assimilant la pandémie à un cas de force majeure, marché public?…

4. Identifier les ressources essentielles à la poursuite des activités essentielles

Exemples :

  • Direction 

  • Service paye 

  • Ressources humaines 

  • HSE 

  • Energie et utilités:

  • Eau, gaz

  • Electricité (sécurisation des dispositifs de sécurité tels que les détecteurs incendie et d’émissions de produits …) 

  • Energie hydraulique

  • Informatique, téléphonie

  • Prévenir les risques de perte de données, de dépassement de capacité de stockage, …

  • Vigilance concernant la menace de cyber-attaque: cf site de l’Anssi https://www.ssi.gouv.fr/

  • Prévoir la mise en place d’un cloud sécurisé, prévoir la mise en place de moyens de communication… 

  • Restauration ;

  • Maintenance des installations ;

  • Entretien des locaux : prévoir le lavage des poignées de porte, des boutons d’ascenseurs, des robinets… ;

  • Gestion, stockage et évacuation des déchets (risques incendie, risques biologiques, prise en charge par les prestataires ...)

  • Gestion de la station d’épuration

  • Le médical : Infirmiers, médecine du travail sauveteur secouriste du travail

En cas de fermeture d’un site, ces différentes mesures sont à renforcer. Il ne faut pas minimiser la difficulté de fermer une activité, qui peut engendrer des risques plus importants à terme.

La fermeture d’un site implique de réfléchir à ce qui pourrait se passer pendant la fermeture ce qui, évidemment, dépend de la durée de cette fermeture. Pour les crises, les fermetures dépendent de l’évolution des pandémies.

  • Quelles sont les fonctions qu’il faut absolument maintenir sur le plan administratif, technique pendant la fermeture ?

  • Qui dois-je avertir en cas de fermeture ?

  • Quel mode d’accès au site pendant la fermeture : qui, comment ?

  • Quelles sont les actions à entreprendre impérativement avant de fermer ?

Exemples :

  • Vidange ou pas des cuves, évacuation des déchets, etc.

  • Assurer la sécurité physique du site et matériels : gardiennage, vidéosurveillance ...pour éviter le risque de vol et d’intrusion;

  • Assurer la prévention du risque incendie;

  • Etc.

5. Choisir le mode d’organisation pour chaque activité essentielle :

Recenser les personnes devant obligatoirement être sur le site avec mise en place des mesures de sécurité :

Exemples :

  • Mode d’accès au site : transports, accès aux locaux ; privilégier les modes de transports individuels …

  • Aménagement du temps de travail : horaires décalés pour éviter les heures de surcharge des transports en commun ; recours aux heures supplémentaires …

  • Organisation du travail respectant les règles de distanciations, privilégier les modes alternatifs aux réunions (téléphone, mails, visioconférence) …

  • Conduite à tenir vis-à-vis des visiteurs indispensables : traçabilité, filtrage …

  • Restauration : si maintien, horaires décalés pour éviter la promiscuité, mesures d’hygiène …

  • Moyens de prévention : équipements de protection individuelle, solutions hydro-alcooliques, gants à certains postes, lieux de stockage et mode de distribution, etc.

Recenser les personnes en télétravail (assurer la continuité de l’activité tout en limitant le risque de contagion) ;

Consulter les instances représentatives du personnel ;

Etablir les conditions d’exécution du travail et les moyens matériels (matériel informatique, téléphonie, utilisation de moyens sécurisés, alerter sur les menaces de cyberattaques …)

Sensibiliser aux « bonnes pratiques informatiques » : ouverture de PJ, de lien internet …

Sensibiliser les managers au management de collaborateurs en télétravail etc.

6. Contrats, banques et assurances

Contrats: clauses contractuelles d’imprévision, indemnités de rupture, droit et juridiction applicable.

Assurances :quelle couverture pour les dommages autres et les manquements contractuels ? Relire attentivement les polices ou les faire lire par un courtier.
Exemples : responsabilité civile du fait de l’incapacité d’honorer un contrat, couverture des dommages immatériels s’ils n’ont pas été exclus explicitement des contrats, responsabilité civile délictuelle (cas de contamination d’un tiers)

Banques : qu’ont-elles prévu ? Moyens de paiement alternatif, mobilisation des créances, transfert des fonds des fournisseurs.

7. Se préparer à la sortie de crise

Etablir des procédures de sortie de crise

  • Qui préparera la reprise du travail ?

  • Quelles conditions pour reprendre : disponibilité des fournisseurs, des clients, attitude de l’administration, disponibilité des matières premières …

  • Quels délais de préparation ?

  • Réaliser un diagnostic des installations.

  • Evaluer les impacts environnementaux.

  • Etc.

III. Cas particulier des sites classés Seveso et des sites nucléaires 

Concernant les sites classés Seveso, l’exploitant doit disposer d’un Plan d’opération interne (POI) qui définit les mesures de gestion de la sécurité sur le site en fonction de son étude de dangers. Pour les ICPE soumises à autorisation (sans être Seveso), le POI est imposé par le préfet s’il l’estime nécessaire (article R. 512-29 du Code de l’environnement). Les arrêtés préfectoraux d’autorisation d’exploiter précisent généralement que l’exploitant doit prévoir les procédures adaptées à une exploitation en "mode dégradé".

Les entreprises peuvent s’inspirer de ces pratiques pour mettre en place un PCA.

- UIMM nationale